La SaintéLyon 2022

La Sainté c'est une ambiance. Il y a la Halle Tony Garnier, une immense Halle à Lyon qui accueille tous les coureurs pour le retrait des dossards dans une ambiance festive. Il y a la migration des coureurs emmenés en car sur les différents départs des courses. Il y a le parc des expositions de St Etienne où nous sommes parqués pendant plusieurs heures, en attendant le départ . Cet immense hangar qui ressemble plus à un camp de réfugiés qu'à un départ de course.

Image du parc des expositions de Saint Etienne

La Sainté c'est un public incroyable qui nous encouragent qui crient, chantent et dansent à notre passage tout au long du parcours.

La Sainté c'est un mythe. C'est le premier trail de l'histoire en France, bien avant les Templiers, ou l’UTMB, même si certains lui contestent le droit de s'appeler trail (trop de route, pas assez de dénivelé). C’est la course « en nature » la plus populaire de France : 17000 participants à l'événement qui comprends de nombreuses courses et 6000 partants pour la Sainté, l’épreuve historique de 80 km, sans compter les participants à l'épreuve de relais nombreux au départ de St Etienne avec nous. 

La Sainté c’est une messe, une célébration de la passion de la course à pied, car il faut bien être passionné pour aller courir dans la nuit, le froid, la pluie, la neige, la glace ou la boue. Courir 80km sur du verglas, dans des terrains boueux, des descentes glissantes ... 

Non la Sainté n'est pas une jolie balade, même si l'on peut s'extasier au détour d'un virage au sommet d’une colline de voir cette magnifique guirlande de lumière des frontales des coureurs qui serpentent la campagne et les collines. La Sainté c'est plutôt un chemin de croix, un calvaire, où les coureurs vont puiser leurs forces et leur résistance au plus profond d’eux même.

J’avais déjà fait cette course en 2017, dans le froid, le vent et le verglas. Une fine couche de neige avait recouvert les monts du Lyonnais et blanchie les paysages. C’était une ambiance sibérienne ! Le sol était gelé, il craquait sous nos pas. Le charme était là. Les descentes étaient totalement verglacées, impossible d’éviter les chutes. Les coureurs passaient quelques fois par les côtés en sous-bois pour éviter les passages en patinoire, ou s’accrochaient aux troncs, aux branches. Inévitablement les chutes s’enchainaient. Je ne les comptais plus pour ce qui me concerne, peut-être une dizaine. Malgré tout cela, je gardais un souvenir mémorable de cette course. C’était mon premier trail long et la première fois que je courais dans la nuit.

 Alors quand à peine 10 jours avant la course, je découvre qu’il reste des places, une envie irrépressible me prend d’enfiler une nouvelle fois un dossard pour accomplir un dernier périple et conclure en beauté cette année 2022 déjà très riche.

Je suis donc parti seul en train ce samedi après-midi de décembre pour me rendre à Lyon où j'allais retrouver Valentin, un membre du club de course de Gif qui avait fait naitre en moi cette envie, quelques semaines auparavant, en évoquant cette course lors d’un entrainement.

avant le départ avec Valentin dans le parc des expositions de Saint-Etienne


En 2022, c’est la pluie qui s’est invitée, et quand il pleut sur des chemins de terre labourés par des milliers de coureurs, cela fait de la boue, une boue bien grasse, une boue bien collante et glissante.

Me voilà parti à minuit dans la vague 2, après 40 minutes d’attente à l’extérieur. Valentin que j’ai retrouvé avec sa femme et en compagnie de Gilles un ami à eux sont restés derrière. Ils partiront dans la vague 3, 15 minutes plus tard.


Les premiers kilomètres sont sur route, nous traversons Saint Etienne. La route est large et permet d’accueillir le peloton de coureurs qui n’est pas encore étiré. Puis nous attaquons les premiers chemins. Il n’y a pas d’embouteillage, nous sommes tout de même en groupe serré.

Il ne pleut pas encore, mais les chemins sont déjà boueux. Le ton est donné.

Le public est présent partout sur ces premiers kilomètres au bord de la route ou au bord des chemins. Il est survolté, cris, trompettes, musique à fond, c'est la fête partout. Des groupes de jeunes se sont réunis, certains ont élu domicile au milieu d'une côte en plein champ. Quelle ambiance ! à certain moment, on se croirait dans la montée de l’Alpes d'Huez sur le Tour de France.   

La température est proche de zéro et pourtant nous ne ressentons pas le froid. C’est sans doute l’effet de l’excitation et du rythme plus élevé du début de course. Un coureur lance un appel aux autres coureurs qui l'entourent « Pour les coureurs expérimentés, est ce qu’il est raisonnable d'enlever une couche de vêtement ? » Un gars lui répond (à voir si celui-ci était vraiment expérimenté ?) « oui tu peux y aller si tu as chaud ». Comme la réponse est sans appel, je m’abstiens de faire un commentaire. Mais je pense en moi même que c'est bien imprudent!

C’est à partir de ce point que la température va commencer à baisser à mesure que, nous élevons sur les sommets des monts du Lyonnais. Nous serons souvent à découvert en plein vent et la pluie va aussi faire son entrée.

Arrivé au premier ravito (17km et 600m de d+), je suis en avance de 15min sur mon temps de passage prévu, 2 heures de course. Je ne ressens pas encore la fatigue malgré mon allure relativement élevée, mais je sens le froid prêt à mordre. Le ravitaillement est en plein vent à l’extérieur. Il pleut. Quelques barnums sont alignés pour protéger les tables. Je rempli mes flasques et je repars vite pour ne pas me refroidir.

Les faux plats montants s’enchainent dans cette première partie de course. La fatigue me gagne alors. Je ne l’attendais pas sitôt dans la course. Il faut dire que je n’ai pas fait de préparation particulière puisque la course n’était pas à mon programme. Depuis mon trail à Nice, j’étais plutôt en mode récup et en recherche de vitesse. Je m’accroche donc. 

Image d'une guirlande de lumière des frontales des coureurs


les montées et les descentes sont très glissantes. Il faut faire preuve de dextérité et d’équilibre pour ne pas s’étaler dans la boue. Cela demande quelques contorsions. Il y a quelques chutes très spectaculaires autour de moi et je ne fais pas le fier.

J’atteins le deuxième ravito à Sainte Catherine. Je prends un peu plus de temps pour me ravitailler : une soupe chaude, quelques morceaux de fromage et de jambon. Je prends aussi un café chaud pour tenter de me rebooster. Il s’agit toujours d’un ravitaillement extérieur. Je commence à grelotter. C’est le signal pour repartir rapidement.


Image d'un des ravitos de la Sainté 2022( tirée de "peignée vertical").


Je sais que la portion qui vient est sans doute la plus difficile. Au cœur de la nuit, la pluie cesse mais le froid et l’humidité restent présents. C’est le brouillard qui nous envahit. On ne voit pas à plus de 5 mètres. La lumière de la frontale ne parvient pas à percer ce brouillard. 

Il y a toujours beaucoup de coureurs autour de moi. Mais il s’agit d’un voyage très solitaire qui ne laisse pas de place aux échanges. 

Un mur se dresse devant moi et l’ascension est terrible. Je progresse au ralenti, à chacun de mes pas mes pieds glissent. Je sens que je suis dans le dur. les coureurs autours de moi me doublent. Il n’y a plus de chemin, l’environnement est lugubre nous naviguons entre les troncs d’arbres dans un univers de boue, de lumière blafarde. Il faut trouver les ressources pour franchir l’obstacle, et enfin lorsque le sommet arrive, je reprends vie et espoir.

Les descentes s’avèrent aussi difficiles et une douleur aux genoux s’invite à la fête. En dehors des montées et descentes il y a de nombreux passages plats ou faux plat qui obligent à relancer en permanence. C’est très usant. 

Lorsque j’atteins le troisième ravitaillement, c’est le petit matin. Le jour n’est pas encore visible mais des lumières au loin nous laissent penser que l’on se rapproche de l’agglomération lyonnaise. Nous sommes sortis de la forêt pour retrouver un environnement plus humain. Nous progressons sur des chemins agricoles, nous longeons des champs. La boue est toujours là omniprésente ! 

Je reprends un peu de vitesse sur les faux plats descendants en essayant d’oublier ma douleur aux genoux, et parviens à Soucieu-en-Jarrest. Un village qui porte bien son nom! 

Je retrouve du réconfort à ce ravitaillement. Nous sommes accueillis dans un gymnase. Je prends le temps de récupérer et de reconstituer mes réserves bien entamées. Je cherche un endroit pour m’assoir. Je trouve un banc et échange quelques mots avec mes voisins. 

Il ne fait pas chaud dans le gymnase et je me mets à grelotter. Mon voisin de gauche s’inquiète pour moi, je le rassure en lui disant que cela devrait aller dès que j’aurais repris la course. 

Le prochain arrêt est à 10km et les portions de route succèdent aux portions de chemin. Il n’y a plus trop de difficultés. Il faut juste trouver l’énergie pour continuer à courir après plus de 9 heures de course. 

J’arrive au dernier point de ravitaillement à Chaponost, bien rincé. Le gymnase est cette fois chauffé. Je peux prendre un peu de repos, me ravitailler et enfin réussir à me réchauffer un peu. 

Je termine ensuite la dernière portion de la course sur un bon rythme en réussissant à courir dès que la pente le permet. Je parcours les derniers 13km et 300 m de d+ en 1h40. 

Enfin, je franchis la ligne d’arrivée après 11h19min et 45 secondes. j'éprouve à ce moment une grande satisfaction d'avoir réussi mon dernier challenge de l'année et je repense à tout le chemin sportif parcouru cette année. Le palier des courses de 80 à 100km est franchi, place à 2023 où de nouveaux challenges m'attendent.

211ème sur 719 de ma catégorie M3. 

2485ème au scratch sur 5304 arrivés (703 abandons)

un parcours de 78Km, 2050m de d+ selon l'organisation, j'en ai compté un peu plus.


Merci à Valentin pour les moments partagés à Lyon et à Saint Etienne. Il aura terminé la course malgré une infection à la COVID19 une semaine avant ! Bravo à lui et à sa femme.

Merci à tous les copains de course pour leurs encouragements, merci au club OC Gif, à Geoffrey notre entraineur !  et bien sûr à ma famille qui me soutient et me permet d'assouvir ma passion.



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